dérive edel 4

Suite à une question sur ma dérive, j’ai regardé les deux articles, à lire et très bien faits, sur le démontage et la constitution de la dérive. Je voudrais vous donner en plus, de quoi moudre pour les neurones sur ce système de dérive de l’edel4 et sur l’utilisation de la dérive en général.

 

 

 

 

Saluons d’abord ce principe génial on ne peut plus simple, sans palan ni vis sans fin, mais une simple chaîne pour remonter la dérive. Pas de puits encombrant à l’intérieur, rien de fragile à l’échouage quand la dérive est remontée. Avec l’avantage d’aller voir au plus profond des petites criques, ou de trouver une petite place avec les barques dans un port encombré.

Je suis plus marin que pur voileux, je ne fais pas de régate Je ne navigue qu’en mer un mois par an, mon bateau est bien chargé, je fais de la balade côtière et mouillages forains. En dessous de  2nds je mets le moteur. Ce postulat de départ est posé pour la suite de la discution.

 

Mais à quoi me sert donc la dérive ?

Pour moi, la dérive n’est descendue que du vent de travers  à 90° jusqu'à 45° du vent c'est-à-dire 45° sur chaque bord, soit 90° sur 360°, et donc seulement le quart du temps en navigation.

On ne remonte pas au vent au-delà de 45°, et vent arrière, elle peut faire effet de croche pied et vous amplifie une embardée. De plus, il faut qu’il y ait un minimum de vent, les calmes plats sont fréquents en méditerranée. Il ne faut pas que le vent soit trop fort non plus ! Au-delà de force 6 cela devient impossible de gagner au vent et je cherche un port à 180° sous le vent. Elle est donc remontée et retenue que par la chaîne bien plus des trois quarts du temps en navigation, et tout le reste du temps à l’arrêt au port. D’autre part elle n’est vraiment efficace qu’à faible vitesse, et en eau calme.

Je m'explique

Quand on regarde la surface de dérive totale de la coque de 2.85m2 saumon et safran compris, la dérive ne fait que 0.41m2 soit un petit 15% de la surface totale de dérive. Elle est particulièrement efficace dans les manœuvres de port au ralenti car elle est située dessous au milieu et elle sert de pivot, le bateau vire presque sur place.

Mais dès qu’on accélère, la force de portance augmente comme une aile d’avion ou comme sur les voiles. De même, on va plus vite vent de travers que vent arrière car c’est la quantité d’air passant sur la voile qui augmente sa puissance…Cette portance de la surface de dérive totale dépend du carré de la vitesse. Pour 2 nds, elle est 2x2= 4 fois plus forte qu’à 1nd, pour 3nd elle est 3x3=9 fois plus forte, 25 fois à 5nds etc. On se rend vite compte que le petit bout de tôle n’a plus qu’une très faible incidence sur la force exercée lorsqu’on atteint une certaine  vitesse.

Ce qui devient important c’est la forme de la coque. Le saumon et la carène frégatée de l’edel 4  au niveau du carré lui permet non seulement d’avoir une force anti-dérive importante mais d’avoir également une raideur à la toile assez impressionnante dès qu’on accélère un peu. Pour eux qui pourraient encore avancer que la masse de la dérive donne de la raideur à la toile, je vous répondrai que le poids d’un équipier assis au vent est bien plus efficace. Je pense surtout que c’est cette magnifique forme de carène qui fait si bien marcher ce bateau. Ceci dit, je ne veux convaincre personne et rien ne vous interdit de la laisser la dérive descendue en permanence. Comme toute religion, on y croit ou on n’y croit pas.

plan de coupes edel4

Techniquement, la dérive est tenue par l’axe à l’avant et un talon sur la dérive qui bute à l’intérieur du saumon sur la partie arrière. Le constructeur voulait ainsi que la dérive reste tenue, tant latéralement que verticalement sur l’arrière. Pour accéder au trou de fixation de la chaîne, j’ai supprimé le talon arrière, la dérive n’est donc retenue que par la chaîne sur l’arrière et par l’axe en avant du saumon. J’ai supprimé les plaques d’attache et l’estrope en câble, source possible d’ennuis et qui deviennent inutiles puisque j’ai accès au trou et que la chaîne passe. C’est une chaîne à maillons longs inox, elle descend jusque dans la fente du saumon. Je peux mettre une manille étroite et voire repercer un autre trou sur ma dérive. Je règle ensuite ma chaîne en longueur de façon à ce que, poignée en position basse, l’arrière de ma dérive au niveau de la manille, reste à l’intérieur du saumon. La dérive reste ainsi calée latéralement, la chaîne retenant toujours la dérive verticalement ne peut plus se coincer en travers dans le puits.

Pour la force exercée sur la chaîne, la dérive fait 50kg (densité du fer 7.3) à l’air libre, mais comme elle est immergée, le poids est réduit d’environ 7kg (50/7) elle ne fait plus que 43kg (merci Archimède) Le poids est réparti sensiblement de 20kg sur l’axe et 23kg sur la chaîne. Donc une petite chaîne à maillons longs de 3mm inox, avec une charge de travail de 100kg et de rupture entre 400kg et 600kg suffit amplement. Le point faible reste la manille étroite qui peut lâcher au bout d’une bonne dizaine d’années.

Remise en place de la chaine sur la dérive

C’est le trou de la dérive qui se bouffe en rouillant (et l’axe de la manille peut finir par travailler de travers. Il faut donc, dans un étau avec l’axe en place, écraser un peu la manille en largeur à l’épaisseur de la dérive. Il faut également raccourcir l’axe en le laissant dépasser de deux mm et faire deux fentes en croix de tourne vis en bout de l’axe. Le montage se fait en vissant à fond au tourne vis cruciforme et en écartant ensuite les fentes. On termine en matant ensuite avec deux bons marteaux, l’un servant de contre coup, l’autre écrasant la croix du bout de l’axe. 

Concernant le traitement de surface de la dérive, tout a été dit. Quel que soit le traitement, la rouille reprend toujours le dessus au moins au niveau des trous. J’avais grenaillé la mienne en 2001, mis trois couches d’antirouille de qualité et je l’avais oubliée.

Je la remonte avant de gruter sur la remorque et je la redescend quand le bateau est dans l’eau. Je ne l’ai donc revue que dix ans après, soit au bout de dix mois dans l’eau. Il n’y a plus une seule trace d’antirouille, elle est à nouveau toute rouillée, surtout au niveau du trou, mais elle m’enterra comme ça….

Je pense néanmoins qu’il serait préférable, pour un bateau qui reste le plus souvent dans l’eau, de mettre une tôle en inox. L’inox étant plus rigide, on doit pouvoir mettre moins épais et descendre jusqu’à 6mm d’épaisseur, on réduit ainsi le prix et cela ne rouille plus du tout.

Pour moi, la messe est dite, et je préfère avoir le faible tirant d’eau de la version dériveur que le tout petit avantage au près serré du quillard. La version quillard sortie après le dériveur était, et Monsieur Maurice Edel l'a confirmé, « une concession du constructeur cédée aux puristes ».

Et vous, quelle utilisation faite-vous de votre dérive ?